PRÈS DE 260 000 € POUR LA CORRESPONDANCE DE MARCEL PROUST

Le 10 juillet dernier, Beaussant Lefèvre, assistée de ses experts Alain Nicolas et Pierre Gheno, proposait aux collectionneurs et passionnés une importante partie de la correspondance de Marcel Proust à son ami si cher Louis Suchet d’Albufera.

Les 81 lettres de Marcel Proust dont 75 lettres inédites, permettent de réévaluer encore le rôle d’« Albu » auprès de lui, fourmillant de détails sur la vie quotidienne, affective et littéraire de l’écrivain. Elles offrent en outre un éclairage nouveau sur certains aspects de sa vie, notamment sur ses démarches infructueuses pour tenter d’être admis dans des clubs du grand monde. La fréquentation de Louis Suchet d’Albufera et de Louisa de Mornand offrit à Marcel Proust la possibilité d’observer de près la vie amoureuse et les effets de la jalousie, comme d’appréhender ce qu’était le demimonde, et ainsi d’en nourrir ses personnages de Robert de Saint-Loup, de Rachel et d’Odette Swann et bien d’autre personnes de À la Recherche du temps perdu.

Les institutions et les collectionneurs internationaux étaient présents en salle, au téléphone et sur internet.
L’université de l’Illinois a ainsi acquis plusieurs lettres et la Maison de Tante Léonie à Illiers Combray a préempté 3 lots de cette exceptionnelle correspondance.

Produit global : 259 969 € frais compris – 100 % de lots vendus

31 750 € frais compris
PROUST (Marcel)
Lettre autographe signée «Marcel». S.l., [15 juin 1905, d’après une mention manuscrite postérieure].
14 pp. in-8, liseré de deuil, quelques petits manques marginaux.

«J’admets que professer de l’amitié pour moi exige de la bravoure...»
Longue analyse, très littéraire, de leur relation à l’épreuve de la «mauvaise réputation» de
Proust.

«Mon cher Louis... Tu sais bien que je ne peux jamais parler de toi que comme je le sens, c’est-à-dire avec une
tendresse extrême. Mes doutes, comme tu dis (et qui hélas ne sont pas des doutes) ne concernent pas à proprement
parler ton amitié mais la bravoure de cette amitié. Tu vois que je ne suis pas fier puisque j’admets que professer de
l’amitié pour moi exige de la bravoure.
Je te prie d’ailleurs de garder cette appréciation pour toi. Tu aurais tort de croire que je me figure que c’est par
snobisme que tu me caches et parce que tu ne me trouves pas assez chic.
Je t’avoue franchement que je te crois trop intelligent pour cela. Même au point de vue snob tu sais par expérience
que les gens les plus chics ont tous un ami ou plusieurs qui ne le sont pas et que cela n’enlève rien à leur chic. Non,
je crois que la raison est les choses qu’on t’a dites de moi. Je suis persuadé que tu ne les crois pas. Mais tu te dis
(avec raison) que le fait qu’on les ai dites suffit. C’est ici que je trouve que ton amitié devrait avoir plus de bravoure.
Parce que ce serait être brave à très peu de frais… »

Fiche détaillée
Lot 27
13 335 € frais compris
PROUST (Marcel)

Lettre autographe signée «Marcel». S.l.n.d.
2 pp. in-8, liseré de deuil; apostille autographe du destinataire, «rép[ondu]».

Une anecdote «assez nature» avec récit dialogué: Sarah Bernardt et Réjane sur la Duse

«Mon cher Louis, après vingt grandes pages écrites sur papier écolier grand format, et cinq lettres d’affaires à mon éditeur, à deux directeurs de revue, à un
ruskinien, etc., je me sens la main trop engourdie et le cerveau pareillement pour t’écrire bien longuement. Mais je veux encore te dire adieu par ce petit mot, te
redire aussi toute ma profonde tendresse, mon cher ami dont la pensée me quitte si rarement même pendant que je travaille...
Puisque ta femme s’intéresse à la Duse et aux jugements portés sur elle, dis-lui que Coco Madrazo a parlé d’elle (de la Duse) à 2 jours de distance avec Sarah
[Bernhardt] et avec Réjane. Sarah lui a dit: «Évidemment, c’est une femme de talent. Elle est excellente dans les pièces légères, La Locandiera, Divorçons tout
le répertoire de Réjane. Mais pourquoi joue-t-elle des pièces tragiques où elle est détestable. Ce n’est pas du tout son affaire, cela lui va comme des bretelles à un
lapin». Et Réjane lui a dit: «C’est certainement une très bonne actrice. Elle a seulement le tort de jouer des pièces gaies qui ne lui vont pas du tout. Elle est faite
pour jouer le drame, La Dame aux camélias, La Femme de Claude tout le répertoire de Sarah et elle ne doit pas sortir de là». C’est assez nature, n’est-ce pas ?....»
Les comédiennes Sarah Bernhardt et Réjane furent les deux principaux modèles de la Berma dans la Recherche.
Lot 55

13 970 € frais compris
MORNAND (Louisa de)

Correspondance d’environ 100 lettres, presque toutes autographes signées, et d’environ 60 télégrammes, adressée à Louis Suchet d’Albufera. 1900-1910 et s.d.
Joint, une vingtaine de pièces manuscrites adressées au même (1901-1907).

Importante correspondance, en quasi-totalité inédite, qui documente les amours de Louisa de Mornand et de Louis d’Albufera, et dans laquelle Proust est fréquemment mentionné.

Fiche détaillée
Lot n°56
10 795 € frais compris
PROUST (Marcel)

Lettre autographe signée «Marcel». S.l., [date de réception du 20 août 1905].
4 pp. in-8, liseré de deuil ; date de réception au composteur, apostille autographe du destinataire,
«répondu».

« Mon cher Louis, nos lettres se sont croisées, j’espère que tu as reçu ma demande de pardon et que tu l’as agréée. Je
me sens mieux ce soir, malheureusement cela peut ne durer que q[uel]q[ues] heures ! J’ai bien réfléchi à la question déplacements,
tant réfléchi que par énervement il est possible que je parte pour n’importe où pour ne plus être agité !....»

Fiche détaillée
Lot 30
8 255 € frais compris
PROUST (Marcel)

Ensemble de 3 lettres autographes signées. Janvier 1904.
1. 1 p. in-8, liseré de deuil; date de réception au composteur, apostille autographe du destinataire
«Vu le 8». • 2. 2 pp. 1/4 in-8, liseré de deuil; dates de réception du 29 janvier 1904 et de réponse du 31 janvier 1904 au composteur, apostille autographe du destinataire,
«rép[ondu]». • 3. 1 p. in-8 sur papier quadrillé; date de réception au composteur, apostille autographe du destinataire «rép[ondu]»; bords effrangés avec manques.

1. - Lettre autographe signée «Marcel Proust». S.l., [date de réception du 7 janvier 1904]: «Mon petit Louis [Marcel
Proust avait écrit puis rayé «Albu»], j’ai fait téléphoner pour avoir des nouvelles de Louisa [de Mornand]. On a
répondu que vous étiez sortis. Je suis ravi. Voici les places de vaudeville ou plutôt en q[uel]q[ue] sorte les bons pour
les places. Tâchez avec cela d’avoir des places pour demain par la buraliste...»
2. - Lettre autographe signée «Marcel». S.l. [date de réception du 29 janvier 1904]: «Mon petit Albu... Je vous ai fait
téléphoner ce soir... C’était simplement pour vous parce que je m’étais habillé (quoique très souffrant, à cause de
rendez-vous follement compliqués avec Gabriel de La Roch[efoucaul]d. Il est dans les meilleures sentiments pour
vous) et vous proposais à cause de cela d’aller vous voir. Je rentre tout à fait malade et crains bien de ne pouvoir
bouger ces jours-ci.
Mon amie madame Lemaire aimerait vous connaître. Embrassez Louisa et croyez-moi votre ami... Savez-vous
qui est portraituré dans le Figaro-Modes ! Ou plutôt vous devez le savoir et pourquoi ne l’avoir pas dit ? [en fait,
plusieurs femmes du grand monde et du monde du spectacle sont portraiturées dans le numéro de janvier 1904.]»
3. - Lettre autographe signée «Marcel». S.l., [date de réception du 31 janvier 1904]: «... Mon cher petit Albu, à
moins d’un événement improbable (le désir de voir une sublime exposition japonaise qui ferme demain [la collection
Charles Gillot, exposée à la galerie Durand-Ruel, et qui allait être vendue aux enchères du 6 au 13 février
1904 sur catalogue établi par Siegfried Bing], l’emportant sur ma souffrance d’être sorti aujourd’hui), je ne sortirai
pas demain soir... Il n’y a guères de soir où je sorte où je ne vous fasse téléphoner, sachant bien que vous n’y êtes
pas souvent, mais voulant vous donner cette pensée, et avant de faire téléphoner aux amis que j’irai voir, tenant à
affirmer votre droit de primauté sur votre Marcel.»

Fiche détaillée
Lot 6
6 985 € frais compris – Préemption de la Maison de Tante Léonie
PROUST (Marcel)

Lettre autographe signée «ton Marcel» en deux endroits. S.l., [date de réception du 29 janvier
1909].
4 pp. in-8, liseré de deuil; date de réception au composteur, apostille autographe du destinataire
datant la réponse, «le 9 fév[rier] 09»..
«Comment, ayant eu le bonheur de vivre dans la société d’une femme pareille... n’ai-je pas été moi-même meilleur que je ne suis....»
Récit drôle et cruel d’un dîner donné chez ses parents à Robert de Montesquiou : Proust illustre ainsi la sincérité comme trait de caractère dominant chez sa mère, disparue quelque trois ans auparavant.

Fiche détaillée
Lot 49
 5 715 € frais compris – Préemption de la Maison de Tante Léonie
PROUST (Marcel)

Lettre autographe signée «Marcel». [Versailles], «mercredi» [5 décembre 1906].
12 pp. in-8, liseré de deuil; date du 6 décembre 1906 au composteur en 3 endroits, apostille autographe du destinataire, «rép[ondu] 13 décemb[re]»; quelques perforations d’aiguille
avec infime tache de rouille.

« Moi, personne ne me manque, c’est inouï. Sauf ceux que je ne pourrai plus revoir jamais...»
Belle et riche lettre évoquant l’absence de ses parents défunts (« une douleur mêlée à tout, même à la gaîté»), Reynaldo Hahn (« que j’aime comme un frère »), le comte de Gramont, le duc de Guiche, le prince Radziwill («Léon, ex-Loche»), le mariage d’une Murat avec un Bourbon, etc...»
Fiche détaillée
Lot 36
5 334 € frais compris – Préemption de la Maison de Tante Léonie
PROUST (Marcel)

Lettre autographe signée « Marcel Proust». S.l., [date de réception du 19 septembre 1912].
4 pp. in-8; date de réception au composteur, apostille autographe du destinataire, « répondu le 21 sep[embre] 1912, que désirerons tous que vien[ne], que lisais toujours 1er art[icle] Figaro»; 2 trous de classeur en marge avec perte de quelques lettres.
La littérature : « ce que je considère comme le prix, le charme, le sens de la vie...»
Fiche détaillée
Lot 53